Thibault travaille pour les Urgences Médicales de Paris. Chaque jour, il monte dans sa voiture, se rend aux adresses que le standard lui indique. Dans cette ville qui ne lui épargne rien, il est coincé dans un embouteillage, attend derrière un camion, cherche une place. Ici ou là, chaque jour, des gens l’attendent qui parfois ne verront que lui.
Mathilde et Thibault ne se connaissent pas. Au cœur d’une ville sans cesse en mouvement, ils ne sont que deux silhouettes parmi des millions. Deux silhouettes qui pourraient se rencontrer, se percuter, ou seulement se croiser. Un jour de mai.
Un livre qui nous raconte une journée dans la vie de deux personnages, Mathilde et Thibault. Ces deux là ne se connaissent pas mais leur quotidien peut se résumer ainsi : métro, boulot, dodo !
Mathilde qui a perdu son mari depuis quelques années vit maintenant seule avec ses enfants. Elle travaille dans une grande entreprise ou elle s’est beaucoup investi sans compter les heures. Pourtant un jour, pour une petite remarque que son chef de service n’aura pas apprécié, elle va très vite être mise à l’écart de son équipe, puis avoir de moins en moins de responsabilités, moins de dossiers à traiter, pour être finalement mis au « placard ». On l’installera en effet dans un petit bureau sans fenêtre juste à coté des toilettes. A partir de là commence une vrai descente aux enfers, car même ses collègues ne diront rien de peur qu’ils leurs arrivent la même chose…
Thibault lui est médecin urgentiste à Paris. Il enchaîne les consultations mais passe ses journées au volant de sa voiture. Coincé dans les embouteillages, il repense à Lila cette femme qu’il aimait mais qu’il a réussi à quitter ce matin car leur histoire était à sens unique. Il en profite aussi pour faire le bilan de sa vie et remet en question le choix de son métier…
Souffrance, harcèlement moral, détresse, lassitude, isolement, remise en question, tout y est très bien décrit et tout cela est finalement très réaliste.
Par contre j’ai été un peu déçue par la fin. Mais après réflexion, cette fin n’est que celle du roman, car pour nos personnages la vie continue, et l’on peut donc tout imaginer… Car combien sont-ils dans ce cas à espérer qu’une rencontre ou même un simple regard, au milieu d’une foule toujours plus pressée, pourrait changer leur destin…
Alors arrêtons nous !
“ Mais les gens désespérés ne se rencontrent pas. Ou peut-être au cinéma. Dans la vraie vie, ils se croisent, s’effleurent, se percutent. Et souvent se repoussent, comme les pôles identiques de deux aimants.
“ A trente ans, elle a survécu à la mort de son mari.
Aujourd’hui elle en a quarante et un connard en costume trois pièces est en train de la détruire à petit feu.
“ Quand l’ordinateur se met en veille, le fond d’écran se transforme en aquarium. Des poissons de toutes les couleurs se heurtent aux parois. Ils se croisent, se frôlent, de fines bulles sortent de leur bouche. Ils n’ont pas l’air de souffrir.
Peut-être que tout est là : dans cette inconscience.
Ainsi la vie en bocal est-elle possible tant que tout glisse, tant que rien ne heurte ni ne s’affole.
Et puis un jour, l’eau se trouble. Au début, c’est imperceptible. A peine un voile. Quelques particules de vase déposées au fond, invisibles à l’œil nu. En silence quelque chose se décompose. On ne sait pas bien quoi. Et puis l’oxygène vient à manquer.
Jusqu’au jour où un poisson devenu fou se met à dévorer tous les autres.
“ Quand il est arrivé ici, il n’avait pas trente ans. Il voulait exercer son métier, se confronter à l’énigme des pathologies, se perdre dans la ville. Il voulait connaitre l’étendue des plaies, le hasard des affections, la profondeur des blessures.
Il voulait tout voir et il a tout vu. Maintenant sans doute lui reste-t-il à vivre.
“ Il n’a rien d’un héros. Il a les mains dans la merde et la merde lui colle aux mains. Sa vie se dispense de sirènes et de gyrophares. Sa vie se partage entre 60% de rhino-pharyngites et 40% de solitude. Sa vie n’est rien d’autre que ça : une vue imprenable sur l’ampleur du désastre.
2 Comments
Moi aussi j’ai découvert Delphine de Vigan avec Rien ne s’oppose à la nuit et je suis bien tentée par celui-ci !
J’ai tellement été porté par Rien ne s’oppose à la nuit… que j’ai bien apprécié celui-là, sans le trouver sensationnel non plus.